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Projet de loi pour la protection des épargnants : moins de frais pour plus de performance

Article écrit le 31/03/2022 – Par MINGZI – Crédit photo : Fotolia

Deux sénateurs ont présenté une proposition de loi articulée autour de 12 mesures visant à protéger les épargnants. Encadrement des commissions, fléchage de l’épargne vers des produits moins couteux en frais, transférabilité de l’assurance vie … le point sur les mesures proposées.

Les faibles taux obligataires, doublés d’une hausse de l’inflation, diminuent les rendements des produits d’épargne les plus sécurisés, très prisés des épargnants français, dans un marché de l’épargne marqué, selon les deux rapporteurs, par « une insuffisante concurrence et un niveau élevé de frais pratiqués par les intermédiaires, en particulier pour l’assurance vie ».

Dans ce contexte, Jean‑François Husson, rapporteur général de la commission des finances du Sénat, et Albéric de Montgolfier, son prédécesseur, ont déposé le 29/03/2022, une proposition de loi visant à renforcer la protection des épargnants. Selon Jean-François Husson, « la transparence sur les frais et une réelle concurrence sur le marché de l’épargne constituent un enjeu majeur de pouvoir d’achat des ménages, en permettant à chacun de faire fructifier son épargne sur le long terme ». Les mesures proposées tournent autour de l’interdiction des commissions de mouvement, le référencement des produits indiciels à bas coût, l’amélioration de l’information disponible sur les frais de l’assurance vie ou encore une réelle transférabilité de celle-ci.

Les auteurs espèrent une inscription à l’ordre du jour dès que les conditions liées au calendrier parlementaire seront réunies.

1- Encadrer plus strictement certaines commissions

Le marché de l’épargne français se distingue par l’application de frais de gestion élevés, qui classe la France dans la moyenne haute du classement européen, en dépit de la tendance baissière observée ces dernières années. Aussi, les rapporteurs préconisent d’encadrer plus strictement certaines commissions.

Les rétrocessions

Le Royaume-Uni et les Pays-Bas ont choisi de supprimer le rétrocessions quasiment en totalité, réduisant ainsi les risques de conflits d’intérêt et favorisant la compétition entre les distributeurs, au bénéfice des épargnants.

Envisagée un temps, la suppression totale des rétrocessions a finalement été écartée à court-terme par les rapporteurs. Ces derniers préconisent, pour le moment, le maintien des rétrocessions, notamment parce que le conseil indépendant s’accompagne de la facturation d’honoraires, un système très peu favorisé par les épargnants français.

Les commissions de mouvement

Les deux rapporteurs préconisent de supprimer les commissions de mouvement, prélevées (en plus des frais de transaction) lors d’opérations d’achat ou de vente car celles-ci présentent des risques de conflits d’intérêts, avec une incitation à « faire tourner » le portefeuille d’actifs, sans justification économique ou financière.

Les commissions de surperformance

Facultatives, les commissions de surperformance correspondent à une part variable des commissions de gestion, perçues par la société de gestion lorsque le fonds dépasse un indice déterminé ou un seuil de déclenchement. L’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) a publié des orientations afin d’encadrer plus strictement ces frais. Parmi elles figure le rattrapage des performances négatives : toute sous-performance du fonds sur une période de référence de cinq ans doit avoir été compensée avant que la commission de surperformance ne devienne exigible. Les rapporteurs préconisent d’encadrer cette mesure et d’imposer une période de calcul de cinq ans glissants.

2- Orienter les épargnant vers des produits plus avantageux

Les produits indiciels à bas coût

Selon l’AMF, les produits indiciels, relevant de la gestion passive (ETF) ne sont que très peu proposés aux épargnants par les conseillers ou les distributeurs d’assurance. Pourtant, ces produits comportent des frais beaucoup moins élevés, pour des performances à long-terme équivalentes. Les rapporteurs préconisent de rendre obligatoire le référencement des produits indiciels à bas coût dans tous les produits d’épargne fiscalement avantagés. Cette diffusion plus large pourrait ainsi entretenir une saine compétition et conduire les gestionnaires de produits relevant de la gestion active à diminuer les frais pratiqués, au bénéfice des épargnants.

Un comparatif des frais moyens d’assurance vie pour connaître son coût complet

Frais sur versement, frais de gestion du contrat, frais de gestion des fonds … la structure des coûts d’un contrat d’assurance vie est complexe. Dans ce contexte, les rapporteurs préconisent la mise en place d’un comparateur public des frais moyens d’assurance vie qui permettrait de connaitre le coût complet. Cette mission pourrait être confiée à l’ACPR.

3- Adapter les produits aux nouvelles contraintes de marché

PEA : protéger l’épargnant en cas d’achat d’une action inéligible

Les rapporteurs préconisent d’imposer aux banques de bloquer automatiquement l’achat par leurs clients d’actions inéligibles au PEA. En effet, en cas d’erreur du client, cette mesure permettrait d’éviter qu’il ne soit contraint de transférer les actions inéligibles sur un compte titre ordinaire et perde l’avantage fiscal de son investissement. En cas de litiges et de défaut d’information avéré de la part de la banque, l’épargnant bénéficierait d’un dédommagement au moins partiel.

Les fonds non cotés

Les fonds fiscaux permettent d’investir dans des sociétés non cotées. Ce sont des fonds de capital risque ou de capital investissement, auxquels sont attachés des avantages fiscaux, contrepartie des aléas plus importants liés à la prise de participations dans ces sociétés. Or, certains de ces fonds présentent des encours très faibles, ce qui entraine des frais plus élevés (car les économies d’échelle sont moins importantes) et un risque plus élevé (car la diversification du portefeuille est moindre).

Pour atteindre une taille critique et offrir des produits plus efficaces aux épargnants, les rapporteurs préconisent que les seuils soint rehaussés, avec, en contrepartie, une hausse temporaire du taux de la réduction d’impôt sur le revenu au titre du dispositif Madelin ou « IR-PME », de 25 % à 30 %.

La transférabilité des contrats d’assurance vie

Lors de l’examen de la loi « Pacte », le Sénat s’était prononcé en faveur d’une transférabilité totale des contrats d’assurance vie, d’un assureur à l’autre, dès lors que le contrat avait plus de huit ans. Les rapporteurs préconisent de mettre en œuvre cette mesure en y ajoutant un plafonnement annuel des sommes pouvant être transférées chez un autre assureur.

La migration de l’assurance vie vers les PER

La commercialisation des PER rencontre un certain succès. Le PER ressort comme un produit particulièrement adapté à l’investissement de très long-terme et à la préparation de la retraite. Dans cette optique, pour encourager la migration de l’assurance vie vers les PER, les rapporteurs préconisent de proroger au-delà du 1er janvier 2023 le bénéfice de l’incitation fiscale mise en place par la loi « Pacte » pour encourager le transfert de l’assurance vie vers les PER.

Un produit d’épargne retraite peu coûteux pour l’épargnant

Du fait de sa fiscalité avantageuse en cas de décès, le PER assurance a pris le pas sur le PER bancaire. Pourtant, les PER compte-titres ont aussi des atouts à faire valoir auprès des épargnants, dont la diversification des supports d’investissement et des frais moins élevés. Les rapporteurs proposent d’encourager son développement en créant un PER dont la gestion serait peu chargée en frais, afin d’optimiser le rendement servi, et reposerait sur des fonds indiciels (gestion passive). Sa gestion serait assurée par une entité publique non lucrative, sur le modèle du « NEST » britannique, fonds de pension public.