Testament leg transmission donation

Assurance-vie et changement de bénéficiaire : la volonté du souscripteur prime, même si l’assureur n’a pas été informé à temps

Article écrit le 08/05/2025 – Par MINGZI – Crédit photo : Shutterstock

Changer le bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie est un geste fort, mais encore faut-il que cette volonté soit respectée après le décès. Une récente affaire relance le débat : que vaut une modification si l’assureur n’en a pas été informé à temps ?

Un changement de bénéficiaire à l’origine d’un contentieux

Le litige trouve son origine dans deux contrats d’assurance-vie souscrits par M. U en 1998 et 2004 auprès d’un assureur. En 2014, M. U avait désigné Mme U comme bénéficiaire exclusive des deux contrats. Toutefois, en janvier 2015, il a souhaité modifier cette répartition : il a rempli de nouveaux formulaires pour répartir le capital à son décès entre dix bénéficiaires, dont Mme U, qui ne devait recevoir qu’une part partielle.

Or, après le décès de M. U en 2019, l’assureur a versé l’intégralité des sommes à Mme U, comme si elle était la seule bénéficiaire. L’assureur, estimant avoir ignoré la dernière volonté du souscripteur, a demandé en justice à Mme U de rembourser les sommes indûment perçues, considérant que la dernière modification ne lui avait pas été communiquée avant le décès et n’était donc pas opposable.

En 2023, la cour d’appel donne raison à l’assureur. Elle estime que les avenants remplis par M. U en 2015 n’ont pas été portés à la connaissance de la compagnie d’assurance avant son décès. En application d’une jurisprudence alors en vigueur, elle en conclut que cette modification de bénéficiaires est juridiquement inopérante. Mme U conserve donc les sommes perçues, et l’assureur est débouté de sa demande de remboursement.

La Cour de cassation revoit les règles du jeu

Mais dans son arrêt du 3 avril 2025, la Cour de cassation annule cette décision et effectue un revirement de jurisprudence. Elle affirme que la validité du changement de bénéficiaire ne dépend pas de la connaissance de l’assureur, mais uniquement de la volonté certaine et non équivoque de l’assuré.

Jusqu’alors, la Haute juridiction avait parfois exigé que l’assureur ait eu connaissance de la modification avant le décès. Cette exigence est désormais abandonnée, au profit d’un principe plus conforme à l’article L. 132-8 du Code des assurances : la modification est valable dès lors que la volonté du souscripteur est clairement établie, quelle qu’en soit la forme, et même si l’assureur ne l’a appris qu’après le décès.

La Cour souligne que la désignation d’un bénéficiaire est un acte unilatéral de volonté du souscripteur. Ce dernier peut le modifier librement tant que le bénéficiaire n’a pas accepté le contrat. L’assureur n’a pas à donner son accord ni à être informé à l’avance. La jurisprudence antérieure, qui exigeait la connaissance préalable de l’assureur, risquait de priver d’effet une volonté pourtant claire, simplement pour des raisons de forme ou de transmission administrative.

Ce nouveau principe vise donc à respecter pleinement la liberté contractuelle de l’assuré et à éviter des injustices, notamment en cas de négligence ou de retard dans l’envoi des documents à l’assureur.

Quelles conséquences pour les assurés et les bénéficiaires ?

Cette décision a plusieurs conséquences pratiques. L’assureur peut toujours se libérer en payant les capitaux au bénéficiaire initial si la modification ne lui a pas été notifiée. En revanche, les véritables bénéficiaires désignés peuvent contester ce versement en justice et réclamer les sommes qui leur reviennent, en apportant la preuve de la volonté certaine de l’assuré.

Source : 3 avril 2025 – Cour de cassation – Pourvoi n° 23-13.803

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